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Textile: une entreprise française transforme du CO2 en polyester

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23 janv. 2023

Pionnière en la matière, la jeune pousse Fairbrics veut récupérer le CO2 rejeté par les industriels pour le transformer en bobines de polyester, avec "l'installation d'une usine pilote qui devrait voir le jour mi-2024", explique à l'AFP son président Benoît Illy. Un rapport publié jeudi derier et mené par l'université d'Oxford tend à montrer que les projets d'élimination du CO2 sont actuellement largement insuffisants pour atteindre les objectifs climatiques internationaux, qui vont nécessiter le développement massif et rapide de technologies innovantes. D'où le caractère essentiel de ces nouveaux développements industriels.


Les fondateurs de Fairbrics: à gauche, Tawfiq Nasr Allah et, à droite, Benoît Illy. - DR



QUESTION: Comment fonctionne cette technologie?

REPONSE: "Nous utilisons du CO2 industriel. Le problème, ce n'est pas la capture, c'est qu'est-ce qu'on en fait après la capture? Ça coûte cher de s'en débarrasser et aujourd'hui, il n'y a pas de valorisation. Il y a plusieurs projets à grande échelle sur des plateformes pétrochimiques (dans le nord de la France, à Anvers en Belgique, à Rotterdam aux Pays-Bas, en Norvège), consistant à capturer le CO2 et à l'enfouir sous la mer. Capter du CO2 coûte environ 20 euros la tonne, s'en débarrasser 100 euros la tonne. En échange de la récupération de CO2 d'industriels, nous avons un matériau de base à un coût quasi nul. Potentiellement, ils n'ont pas à payer de taxe carbone et peuvent communiquer sur leur engagement à réduire leurs émissions. Nous n'avons pas encore d'accord signé, mais nous avons beaucoup discuté avec les pétrochimistes et nous avons commencé à parler avec les sidérurgistes. Les marques de mode, elles, nous ont fait un retour super positif. Nous avons noué trois partenariats, avec H&M, Aigle et On-Running, qui ont payé une partie de notre développement."

Q: Est-ce rentable? Comment concurrencer la production chinoise, par exemple?

R: "Nous avons des prédictions qui nous permettent de calculer que nous aurons un coût qui sera voisin des productions de matières pétrosourcées, entre le même prix et deux fois plus cher. Les marques nous ont dit que c'était acceptable, car il y a un bénéfice environnemental. Aujourd'hui, nous travaillons sur l'installation d'une usine pilote qui devrait voir le jour mi-2024 à Anvers. Nous récupérerons du CO2 sur la plateforme pétrochimique de son port. Cette phase préindustrielle nous permettra de produire l'équivalent de 1.000 T-shirts par jour. Nous avons assez d'argent pour l'usine pilote, mais pour l'usine à taille réelle, qui nécessiterait un investissement de plusieurs dizaines de millions d'euros, nous devrons faire une nouvelle levée de fonds dans douze mois. Ce qui est compliqué, c'est le coût de l'énergie, beaucoup plus chère en Europe qu'en Chine. Mais comme cette technologie nécessite peu de main-d'œuvre (techniciens et ingénieurs), nous pourrons être compétitifs même avec des salaires européens. En développant notre innovation, nous avons réalisé qu'il y avait un fort engouement pour rapatrier de la production en France, notamment avec la crise Covid et les problèmes d'approvisionnement. Au début, nous voulions produire en Asie, mais nous avons changé d'avis et nous voudrions produire en Europe, pour le marché européen et licencier la technologie pour les Etats-Unis et l'Asie."

Q: Si le système de production est plus vertueux, est-ce pertinent de continuer à produire du plastique?

R: "Quand on compare notre produit avec une fibre actuellement sur le marché, on note que cette technologie permet de réduire l'impact carbone de 70%. S'habiller est un besoin primaire. Le polyester, en étant une fibre synthétique, peut être produite de manière très efficace, en utilisant très peu d'eau et de ressources, contrairement au coton, fibre naturelle, mais qui a un impact désastreux sur l'environnement."


Par Ornella LAMBERTI
Paris, 23 jan 2023 (AFP)

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