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Patrick Dujeux (Marques Avenue) : "Internet a ancré l'achat de marques en déstockage dans les esprits"

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30 oct. 2017

Le groupe Concepts & Distribution prendra en janvier prochain le nom de son enseigne phare, Marques Avenue, que porteront aussi bientôt les deux outlets Quai des Marques. A l’heure où les magasins de Franconville, de L’Île-Saint-Denis et de Romans connaissent des rénovations et extensions, le directeur général de l’entreprise, Patrick Dujeux, fait le point avec FashionNetwork.com sur la stratégie du spécialiste du déstockage et l'évolution du secteur.


Patrick Dujeux - Marques Avenue


FashionNetwork : Dans quelle stratégie s’inscrit le processus de modernisation de votre réseau ?

Patrick Dujeux : Le réseau a 25 ans déjà. Nous sommes nés en 1993 et, en un quart de siècle, beaucoup de choses se sont passées. Des sociétés ont disparu, d’autres se sont lancées. Pour autant, la magie de l’outlet est toujours là. Même si la consommation est aujourd’hui bien différente, le modèle s’est affirmé. Et si la part de l’outlet dans le commerce reste limitée, ce modèle continue de se développer. Nous n’avons de notre côté jamais fait autant de chiffre d’affaires. Cette année, nous atteindrons les 500 millions d’euros. C’est un record absolu. Nous affichons une progression à périmètre comparable de plus de 10 % sur les neuf premiers mois de l’année, ce dont peu de commerces peuvent se prévaloir.

FNW : A l’arrivée d’Internet, beaucoup de personnes annonçaient pourtant la mort des outlets....

PD : Nous avons, comme tout le monde, eu cette interrogation. Or, le chiffre d’affaires des outlets en France n’a jamais été aussi fort qu’aujourd’hui, chez nous comme chez les concurrents. Il suffit de voir le nombre d’outlets inaugurés depuis 2010, alors que nous étions pratiquement les seuls acteurs dans les années 2000. Vu nos résultats, et au regard du fait que nous représentions la moitié du marché, voire un peu plus, on voit bien que les inquiétudes étaient infondées. Je pense qu’internet a tué d’autres formes de commerces. La VPC a eu beaucoup plus de difficultés par exemple.

FNW : Le déstockage en ligne a-t-il contribué à populariser la notion d’outlet ?

PD : C’est exactement ce qui s'est passé. Ces ventes événementielles ont contribué à inciter les consommateurs à trouver des solutions intelligentes pour acheter de jolies marques à des prix moins élevés. Les ventes privées ont ancré l'achat de marques en déstockage dans les esprits. D’ailleurs, quand on regarde les achats des consommateurs, la part des prix démarqués est désormais très forte. Les outlets sont une vraie réponse à cela. Sauf que nous le faisons désormais dans des centres beaux, qualitatifs, avec de vraies vitrines, une mise en valeur des produits, des espaces de détente… L'expérience client est très loin de ce qu’elle était il y a seulement dix ans. C’est notamment l’objet de nos rénovations : nous n’avons jamais cessé de faire évoluer l’offre, mais nous devons aussi faire évoluer l’expérience shopping. Car c’est là que nous attendent les consommateurs. Sur notre ouverture la plus récente, Marques Avenue A13 (à Aubergenville, dans les Yvelines, ndlr), nous avons suivi cette logique dès le développement et les résultats sont extraordinaires. C’est là notre force face à Internet : trouver des bons prix est facile, passer un bon moment un peu moins.

FNW : Quel est l'impact d'une meilleure expérience client sur l’activité ?

PD : La qualité de l’expérience augmente la récurrence des visites et le panier moyen, car cela allonge la durée des visites. Nous ne sommes pas sur un modèle où nos centres sont adossés à des grandes surfaces alimentaires, où les consommateurs se rendent en moyenne entre 30 et 40 fois par an. Sur le marché des outlets, nos centres sont visités deux ou trois fois chaque année. Donc, si l’on passe de 2 à 2,5 visites par an, cela représente énormément de chiffre d’affaires en plus. C’est dans cette optique que nous venons d’initier la rénovation de l’outlet de Talange, en Moselle, ainsi que celui de Corbeil-Essonnes. Ce dernier est le plus fort de notre réseau, mais il a dix ans et il faut désormais que nous ajoutions à l’expérience shopping.

FNW : L’une des différences qui demeure avec le commerce classique est l’impossibilité de consulter les stocks à distance. Est-ce une piste sur laquelle vous travaillez ?

PD : C’est un sujet technique hyper compliqué. Car, quand on est sur le réseau principal d’une marque et que l’on consulte les disponibilités, il s’agit de stocks disponibles en entrepôts qui peuvent être livrés facilement. Pour un outlet, c'est plus complexe et on ne saura pas le faire tout seul, car nous n’avons pas accès au stock des enseignes.

Pour autant, cette consultation des disponibilités sera probablement l’un des sujets majeurs qui nous permettront de devenir omnicanal. A moyen terme, il faudra pouvoir mettre en place une consultation, et donc une réservation et un retrait en magasin. Mais c’est encore trop tôt pour l’outlet. En revanche, nous utilisons déjà Internet pour mettre en avant des idées de looks et de pièces.

FNW : Pensez-vous qu’il reste des zones en France pouvant accueillir de nouveaux outlets sans cannibaliser l’existant ?

PD : L’une de nos réponses à cela est de créer une marque unique pour tous nos centres afin d’afficher clairement notre présence forte dans toute la France. Mais, oui, il reste de la place pour quelques nouveaux outlets dans l'Hexagone. J’ai connu Marques Avenue à Troyes en 1993 et, à l'époque, les consommateurs affluaient du Nord et de l’Est. On n'en est plus là. En revanche, nous nous rapprochons des clients. Dans le Nord, je pense qu’il n’y a plus de place, de même que dans l’Est. Dans le Centre, l’Ouest et le Sud-Ouest, il reste des possibilités, avec des espaces pour un ou deux centres, selon les zones. Sur cette question, comme dans notre stratégie, la place du tourisme est importante.

FNW : La clientèle étrangère est-elle toujours une cible importante ?

PD : La France est l’une des principales destinations touristiques mondiales et Paris l’une des villes les plus visitées. Quand vous faites de la pub sur les cars Air France pour dire que vous avez des outlets à L’Île-Saint-Denis et Corbeil-Essonnes, vous avez des consommateurs étrangers qui arrivent dans vos centres. On le voit notamment grâce à la détaxe, dont on peut faire bénéficier les clients directement sur place. Nous avons des consommateurs libanais, latino-américains, chinois… A Bordeaux, nous sommes voisins de croisiéristes et nous retrouvons beaucoup de passagers en boutiques. Il faut aussi aller chercher les touristes là où ils sont, d’où un travail avec les agences de tourisme. On serait bête de passer à côté de cela, mais cela implique aussi de prendre des dispositions, notamment en termes de signalétique et d’accueil.

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