Par
AFP-Relaxnews
Publié le
2 mai 2023
Temps de lecture
6 minutes
Télécharger
Télécharger l'article
Imprimer
Taille du texte

Mode et réseaux sociaux: la fin de la lune de miel?

Par
AFP-Relaxnews
Publié le
2 mai 2023

L'industrie de la mode n'a jamais été aussi présente sur les réseaux sociaux, mais les polémiques à répétition et le désintérêt des jeunes générations pour certaines de ces plateformes pourraient rebattre les cartes. Il s'agit désormais pour ces acteurs de trouver d'autres canaux pour communiquer avec leur communauté - et la fidéliser. Des podcasts aux magazines digitaux en passant par les séries télévisées et le métavers, les solutions sont aujourd'hui nombreuses pour ne plus dépendre uniquement des médias sociaux.


DR



Avec des millions, voire des dizaines de millions d'abonnés sur Twitter, Facebook, Instagram, et TikTok, les marques de prêt-à-porter bénéficient depuis plusieurs années d'une visibilité dont elles n'ont jamais joui auparavant. Une campagne de publicité, une nouvelle collection, une collaboration, et même un défilé, peuvent aujourd'hui générer des millions de vues en un rien de temps, et c'est sans compter sur les 'amis' - généralement célèbres - de ces marques qui, en un clic, ont la capacité de décupler ces visionnages tout aussi rapidement.

On l'a vu à la fin de l'année 2022 avec une 'simple' campagne Louis Vuitton réunissant Lionel Messi et Cristiano Ronaldo, dont le cliché a battu des records de likes sur Instagram - quelque 70 millions - devenant l'une des publications les plus aimées de l'histoire de l'application appartenant désormais à l'américain Meta.

Une union lucrative



Si l'industrie de la mode a succombé à l'appel des réseaux sociaux bien avant la pandémie de Covid-19, il faut reconnaître que la crise sanitaire a considérablement accéléré cette histoire d'amour naissante. Forcés de fermer les portes de leurs magasins, mais aussi de renoncer à leurs défilés et campagnes publicitaires, les acteurs du secteur ont trouvé en Twitter, Facebook, Instagram, et même TikTok, un moyen de maintenir le contact avec leur communauté et, pourquoi pas, d'innover pour l'agrandir. De Zara (57 millions d'abonnés sur Instagram) à Gucci (51 millions d'abonnés) en passant par Nike (280 millions d'abonnés): tous les segments de la mode profitent aujourd'hui d'une visibilité hors norme.

Le pari s'est donc révélé gagnant pour toute l'industrie. Laquelle a rapidement su transformer sa stratégie de communication pour doubler la mise. Il suffit de regarder les premiers rangs des derniers défilés pour s'apercevoir qu'à quelques exceptions près les influenceurs se sont substitués aux plumes de la presse féminine et généraliste, et que ces mêmes influenceurs ont également remplacé mannequins et égéries pour promouvoir les nouveautés des géants de la mode. Résultat, une maison historique comme Lanvin a gagné pas moins de 900.000 abonnés sur Instagram, la plus forte progression l'année dernière, pour atteindre les six millions de followers, d'après des données publiées par l’agence de performance marketing Landing Partners.

Incontrôlables réseaux sociaux



Mais l'histoire d'amour entre la mode et les réseaux sociaux est-elle vraiment faite pour durer? Nombre d'indicateurs semblent aujourd'hui au vert pour répondre par l'affirmative… Mais d'autres facteurs pourraient aussi venir gâcher la lune de miel, à commencer par le désintérêt des utilisateurs pour certaines plateformes.

Pour la première fois de son histoire, Facebook a perdu des utilisateurs au dernier trimestre 2021 - 4 millions d'usagers quotidiens entre septembre et décembre 2021. Une goutte d'eau au regard des quelque trois milliards qui demeurent aujourd'hui actifs, mais qui en dit long sur le désintérêt du public pour certaines de ces applications. Et c'est sans compter sur les remous qui secouent Twitter depuis l'arrivée d'Elon Musk à la tête de la firme américaine. Chose qui a valu le départ de Balenciaga, ou même de la mannequin star Gigi Hadid, du réseau social à l'oiseau bleu.

Ce n'est pas tout. Certaines marques de mode ont également dû faire face à des polémiques qui ont entaché leur image. L'un des cas les plus récents concerne justement Balenciaga, qui a fait un bad buzz monumental après avoir diffusé une campagne mettant en scène des enfants avec des accessoires connotés sexuellement. En quelques heures seulement, les vidéos - et les critiques - ont afflué de toute part, TikTok en tête, pour dénoncer les clichés dévoilés par la maison de luxe, au point de pousser Kim Kardashian herself à remettre en question son partenariat avec la marque.

Et ce n'est pas la seule, puisque le géant suédois H&M a de son côté fait les frais de la colère de Justin Bieber après avoir commercialisé une collection à son effigie. Le chanteur, qui n'aurait pas approuvé, selon ses propres dires, les produits en question, les a comparés à "des déchets" et de "la camelote" dans une story Instagram… Des propos vus - a minima - par ses 280 millions de followers, qui n'ont sans doute pas été bénéfiques à l'enseigne.

Comment contrôler son image à l'heure des réseaux sociaux? Telle est la question à laquelle les marques doivent aujourd'hui apporter une réponse. Le comble étant qu'un départ de ces plateformes ne réglerait sans doute pas le problème: la campagne de Balenciaga aurait fait grand bruit, peu importe la présence ou non de la maison de luxe sur les réseaux sociaux. Mais on le voit, l'idée semble aujourd'hui au contraire de ratisser large avec une mainmise sur l'ensemble des canaux de communication disponibles, et si possible ceux prisés par la cible de prédilection des marques de mode: la très convoitée Gen Z. On le voit avec l'arrivée de la plupart de ces acteurs sur TikTok, bien que certains n'aient pas l'air d'y être très actifs, et l'émergence de formats plus courts entièrement dédiés aux plus jeunes générations. Reste que même cela ne semble pas suffisant, incitant l'industrie de la mode à rechercher (toujours) d'autres moyens de communication.

Une présence omnicanale nécessaire



Certaines marques ont vu le vent tourner bien avant les premières polémiques. C'est le cas de la marque Lush dans le secteur de la beauté, qui a quitté les réseaux sociaux pour préserver "la santé mentale" de ses abonnés, mais aussi de la maison de luxe Bottega Veneta dans la mode. Pas question toutefois pour cette dernière de briser le lien établi avec sa communauté. Non contente d'avoir retrouvé une communication plus traditionnelle, basée sur ses produits mais aussi sur ses engagements, la marque a également innové avec son propre journal digital, "Issue", permettant de contrôler sa communication.

Et elle n'est pas la seule à chercher de nouvelles solutions, puisque l'enseigne de prêt-à-porter Don’t Call Me Jennyfer a lancé au début de l'année sa propre application immersive, basée sur le concept d'un réseau social, avec du contenu, des promotions, du cashback, et bien évidemment la possibilité d'acheter des produits en quelques clics seulement. Un média personnel et sur mesure, voilà un concept qui pourrait inspirer plus d'une marque à une époque où les consommateurs recherchent une expérience shopping personnalisée.

Plus qu'un désamour des réseaux sociaux, c'est une présence omnicanale qui semble aujourd'hui faire rêver les marques de mode. De quoi alpaguer toutes les générations, mais aussi toutes les strates sociales. Le retour des campagnes publicitaires traditionnelles, avec des égéries issues de tous horizons, le montre, tout comme l'avènement des podcasts articulés autour de l'histoire ou des engagements des plus grandes maisons de luxe, ainsi que la pérennisation des placements de produits dans les séries télévisées et le gaming.

Les nouvelles technologies, notamment le Web3 et l'intelligence artificielle, constituent également une voie royale pour ces marques en quête de visibilité chez les plus jeunes générations. Il n'est pas étonnant que la mode apparaisse comme l'une des industries ayant fait le plus de chemin dans le métavers, via des collections de mode virtuelle, des collaborations avec des géants du secteur comme le sud-coréen Zepeto, et même une Metaverse Fashion Week.

Et si l'intelligence artificielle n'en est aujourd'hui qu'à ses prémices, on peut voir l'intérêt que suscite cette technologie à travers l'agent conversationnel ChatGPT. Un nouveau terrain non négligeable pour une industrie qui semble vouloir asseoir son omniprésence dans les médias, quels qu'ils soient… A condition toutefois de ne pas perdre le contrôle.

(ETX Daily Up)
 

Tous droits de reproduction et de représentation réservés. © 2024 AFP-Relaxnews.