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Marguerite Capelle
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25 sept. 2018
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Milan, entre échappées belles et conservatisme

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Marguerite Capelle
Publié le
25 sept. 2018

On a pu observer cette saison à Milan une tendance forte à l’échappée belle chez certains créateurs, tandis qu’à l’inverse, l’ADN d’autres maisons était scrupuleusement respecté. Comme si les créateurs voulaient oublier la vague de chauvinisme qui a submergé le pays et la politique anti-immigration brutale menée par le nouveau gouvernement.


MSGM - Printemps-été 2019 - Prêt-à-porter féminin - Milan - © PixelFormula


Des globe-trotteuses nomades, des bohémiennes, des voyageurs invétérés et des bêtes de soirée ont envahi les podiums avec ces collections printemps-été 2019. Il y avait d’ailleurs bien peu de mannequins qu’on aurait pu croire en route pour le travail. Ou alors juste une demi-journée dans un WeWork, mais en tenue pour pouvoir filer au plus vite vers la terrasse de plage la plus proche. Pourtant, le conservatisme l’emportait toujours dans une petite minorité de maisons plus classiques.

MSGM

Si vous cherchez un esprit d’évasion poussé à fond, rendez-vous chez MSGM. Le défilé s’intitulait « Dream » (rêve). L’invitation : une fausse boîte de pilules, une potion magique associant mélatonine, tryptophane et vitamine B6. Il y avait même une minuscule pilule bleue et blanche dans la boîte.

« La mélatonine améliore l’activité onirique », expliquait le programme papier de la collection MSGM présentée vendredi matin, qui s’adressait aux fêtardes au rythme effréné, celles qui dansent jusqu’à ne plus tenir sur leurs pieds.

Le fondateur et créateur de la maison, Massimo Giorgetti, est originaire de la région des capitales italiennes du clubbing, sur la côte Adriatique. Difficile d’imaginer une collection mieux faite pour les boîtes de nuit.

Du psychédélique pour le cœur de la nuit, des robes paysannes flower power, des manteaux imprimés de quantité de motifs floraux alpestres avec des leggings assortis ou encore des robes en mousseline savamment drapées, fendues à mi-cuisse. Le tout associé à des mini-boots de cow-boy en plastique transparent ou à imprimé « Dream ». Une mode fantasmatique pour aller en boîte tard dans la nuit.
 
Etro

Bien qu’il y ait peu de villes au monde aussi bourgeoises que Milan – capitale italienne de la finance et de la mode, et seule ville du pays où tout fonctionne –, cette métropole a toujours eu un faible pour le genre hippie chic et stylé. Et c’était totalement le cas chez Etro cette saison, avec une collection intitulée « Pacifique Zen », qui parvenait à mélanger la culture californienne du surf et les teintes hawaïennes. Une façon idéale de célébrer le cinquantième anniversaire de cette formidable maison qui a également présenté une brillante rétrospective intitulée « Paisley Generation » (« Génération Motif Cachemire ») au Mudec, le nouveau musée de la mode branché de Milan.


Etro - Printemps-été 2019 - Prêt-à-porter féminin - Milan - © PixelFormula


La créatrice Veronica Etro est même parvenue à introduire un peu d’histoire japonaise en utilisant le denim qualité couture et les graphismes sophistiqués propres à ce pays. Le tout formait un formidable défilé, peut-être un peu incohérent, mais qui offrait des images vraiment saisissantes.

Tasha Tilburg, top expérimentée qui fait un très beau come-back cette saison, était la star du défilé en tailleur de soie à fleurs d’hibiscus, avec un pantalon à cordon et revers contrastants à chevrons. Les pantalons et tailleurs en coton léger étaient souvent associés à de merveilleux kimonos matelassés. D’autres filles sont apparues dans des maxi-peignoirs en patchwork qui tourbillonnaient, avec des pans en jacquard or et en batik nippon, et des perles un peu partout. Beaucoup d’entre elles tenaient des sacs fourre-tout composés de multiples matériaux, avec du tissu à rayures tennis et du denim japonais.

« La joie de vivre baignée de soleil des tribus bohèmes de Venice Beach », expliquait Veronica Etro, qui est venue saluer sous des applaudissements nourris, accompagnée par son père, Gimmo.

« J’étais assis tranquillement en coulisses quand elle est venue me traîner jusqu’ici », lâchait timidement ce dernier, qui était pourtant manifestement le plus fier des papas.
  
Salvatore Ferragamo


Ce défilé marquait la deuxième collection de Paul Andrew, créateur de chaussures extrêmement talentueux, pour Salvatore Ferragamo. Et en termes de souliers, Andrew a mis en lumière l’incroyable étendue de ses talents : des mules sculptées avec des talons en pieds de meubles, des sandales compensées biseautées avec du raphia sur les côtés et de magnifiques bottines en cuir tressé.


Salvatore Ferragamo - Printemps-été 2019 - Prêt-à-porter féminin - Milan - © PixelFormula


Pour ce qui est de la mode, Paul Andrew avait créé le prêt-à-porter féminin et Guillaume Meilland la ligne masculine. Le premier a proposé des jupes en cuir asymétriques astucieuses, des robes foulard vraiment admirables et quelques élégants trenchs en peau d’agneau.

Mais si le savoir-faire déployé était admirable, les vêtements en tant que tels manquaient de peps. C’est une chose de respecter l’ADN d’une marque de chaussures toscane, c’en est une autre de laisser cet ADN vous limiter.

Agnona

Agnona proposait le meilleur du textile italien, avec Edie Campbell pour ouvrir le défilé dans un trench ultra-long, avec une chemise ample et un pantalon large dans des teintes sépia mates, et portés avec de grosses baskets blanches. Un look flatteur pour beaucoup de femmes et pas uniquement pour les top-modèles, ce qui est exactement l’objectif de la marque, dont le leitmotiv est l’élégance informelle.


Agnona Printemps-été 2019 - Agnona Instagram


Des vestes ondoyantes en cachemire couleur blé, des trenchs réversibles dans des tons bruns roux, des cardigans tombant jusqu’aux chevilles en kaki, le tout dessinant une certaine vision décontractée du style. En travaillant avec une palette restreinte et en créant une silhouette indulgente, le créateur Simon Holloway a su proposer tout un lot de produits attirants.

Mais tout cela manquait cruellement d’un message plus affirmé en matière de mode. L’élégance intemporelle, c’est très bien, mais cela manque aussi un tantinet de relief et de pouvoir de séduction.

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