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12 janv. 2022
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Les soldes d'hiver démarrent à l'ombre du Covid

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12 janv. 2022

Le Covid plombera-t-il les soldes d'hiver? C'est ce que craignent les commerçants après leur coup d'envoi, même si les premiers clients partis à la chasse aux bonnes affaires mercredi matin en boutiques ne semblaient pas rebutés par le contexte sanitaire tendu.


Dans les rues de Lille, le 8 janvier 2020. - AFP/Archives


"Je travaille, je vais en cours, alors pourquoi ne pas faire les magasins?", dit Rose, étudiante en psychologie de 19 ans, qui fait du shopping dans les rues commerçantes du Châtelet à Paris.

Malgré la période particulière, les soldes restent un rituel pour Delphine, une mère au foyer de 21 ans, venue du Mans en famille dans la capitale: "On a pris le train à 6 heures ce matin et on reste une nuit à Paris pour nos achats. On s'est posé la question d'acheter en ligne cette année, mais les magasins ont été fermés pendant longtemps, alors on voulait en profiter", ajoute la jeune femme.

Reste que dans la capitale française, en ce premier jour de soldes, la CCI Paris constate "un contexte anxiogène". Elle signale dans un note que les grands magasins du boulevard Haussmann, qui "ne proposent plus d’ouverture anticipée à 8h du matin, comme c’était le cas il y a quelques années", n’ont pas connu une affluence particulière en cette première matinée de rabais.

"Avec tout ce qui se passe au niveau sanitaire", Anna Sanchez, directrice de la boutique Mango de Strasbourg, était plutôt fataliste à la veille du coup d'envoi des soldes. "Notre objectif, ça serait d'essayer de faire aussi bien" qu'en 2019, mais "avec le nombre de contaminations actuel, on n'est pas sûr d'y arriver".

"L'inquiétude est forte, on voit que la décision de mettre tout le monde au télétravail (pour endiguer la propagation du Covid-19) a déjà eu un impact non négligeable sur l'afflux en boutiques", alertait lundi Florence Bonnet-Touré, la secrétaire générale de la Fédération nationale de l'habillement (FNH), qui représente les commerces indépendants du secteur.

"Mercredi, ça sera quitte ou double", soulignait Clémence du Curia, vendeuse chez Aigle à Strasbourg. "Des clients me disent que pendant les soldes, on est trop serré, qu'il y a trop de monde... C'est vrai que ce n'est pas idéal. Mais je reste optimiste, j'ai envie de croire que ça va marcher".

Déjà de forts rabais



Dans ce contexte incertain, les commerçants pourraient être tentés de casser les prix de manière significative, pour bien lancer la période. "On voit déjà des ventes privées à 50%. Les soldes vont démarrer très, très fort car on ne sait pas ce qui va se passer après", estime Christian Baulme, président de la Ronde des quartiers qui représente 400 commerçants de Bordeaux.

A Paris, les ristournes constatées par la CCI dans les boutiques de la capitale sont déjà conséquentes, de l’ordre de -40 à -50% en moyenne, avec certaines enseignes spécialisées (Pimkie, Eram…) qui culminent déjà à -60%. Les commerçants parisiens se disent « plutôt désabusés » et redoutent que le commerce en ligne n’en sorte gagnant. « Entre le froid et la peur du virus, je crais que les gens ne cèdent à la facilité en restant sur leur canapé à passer des commandes sur le web », indique à la CCI Paris une commerçante du XVe arrondissement.

"C'est sans fin"



La période a en tout cas perdu de sa singularité avec l'émergence des promotions et ventes privées, sans oublier la vente en ligne. "On avait déjà remarqué ces dernières années qu'on travaillait mieux certains jours avant les soldes que pendant les soldes", explique Lilit, vendeuse à la boutique Geox de Strasbourg où de nombreux articles affichent déjà -20% ou -30% dans le cadre de ventes privées.

Le contexte d'inflation risque de peser sur les ventes, car quand les autres postes de dépenses sont plus importants, les consommateurs diminuent le budget alloué aux dépenses de mode. De quoi préoccuper les commerçants: 8 commerçants indépendants sur 10 se déclarent inquiets pour la pérennité de leur activité commerciale en 2022, selon la FNH.

Dans les rues du 1er arrondissement de Paris, le constat est mitigé. Pour Laure, 25 ans et employée dans le marketing, "ces soldes, c'est la shopping therapy". Pour la jeune femme qui "n'a pas mis les pieds dans un magasin depuis longtemps", c'est "l'occasion de fermer les yeux sur le budget". Avec "les confinements et le télétravail, je n'ai quasiment rien acheté depuis mars 2020". En revanche, pour Rose et d'autres passants, "le budget est réduit au strict nécessaire" après les dépenses des fêtes de fin d'année.

De quoi pousser, aussi, à trouver d'autres modèles économiques, moins dépendants des prix cassés: ainsi à Bordeaux, Maxime Razes, qui gère la boutique Do you speak français?, vendant des articles uniquement Made In France, ne fera, lui, pas de soldes.

"On estime que le prix du produit est juste pour les producteurs français. Il n'y a pas de raison que le produit soit dévalorisé à une période de l'année", explique-t-il. "Si on fait les soldes, il faut en faire tout le temps, des ventes privées... c'est sans fin".

(Avec AFP : par Corentin DAUTREPPE et Manel MENGUELTI, avec les bureaux de Bordeaux et Strasbourg)

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