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17 sept. 2021
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Les armes de Jules pour partir en reconquête

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17 sept. 2021

Accompagnés par le soleil roubaisien, une quarantaine de visiteurs pénètrent dans le vaste hall vitré du siège de Jules. Une vingtaine de journalistes, et autant d’influenceurs mode, y sont invités à rencontrer directement les équipes. Car trois ans après la restructuration et la mise en place de la fusion avec Brice (qui ont occasionné la suppression de 80 magasins et d'environ 400 postes), Jules fait un point d’étape dans sa transformation axée entre autres sur le "zéro waste" (zéro déchet). Malgré l’impact négatif de la crise sanitaire, l’enseigne de mode masculine fait le dos rond et fourmille de projets pour tenter de progresser sur le marché et continuer de s’orienter vers une mode plus responsable.


Visuel de la campagne automnale de l'enseigne - Jules


"Moins mais mieux, c’est notre raison d’être. Mais cela se fait avec humilité, pas à pas. Jules s’est construit comme un acteur de la distribution mass market, et c’est une force, mais son atout était auparavant le stock. La transition s’opère pour devenir une entreprise responsable en engagée, notamment localement", décrit Franck Poillon, nommé directeur général de l’enseigne en septembre 2020, après avoir passé douze ans dans l’entreprise, notamment dans le département juridique.

La chaîne aux 400 magasins en France affirme aujourd’hui que 35% de sa collection est "in progress", c’est-à-dire fabriquée à partir de fibres plus durables, bio ou recyclées (coton, lin, viscose ecovero…). "Le denim est en avance avec 70% de l’offre qui utilise en grande majorité des fibres recyclées, précise Clémence Berlier, responsable RSE. Au total, cette année, nous aurons économisé 520 tonnes de matières vierges".

L’enseigne née en 2000 réduit donc les quantités de vêtements achetés, pour ne commander "que ce qu’elle est capable de vendre". Plus de 1,5 million de pièces n’ont pas été produites cette année par Jules, qui a décidé de limiter les promotions et n’achète plus de stock dédié aux soldes, comme cela était le cas par le passé. "Le taux de remise moyen chez Jules est passé de -23 % à -15%, indique le directeur général. Cela participe d’un modèle plus vertueux financièrement. D’ailleurs le niveau de marge est aujourd’hui plus élevé qu’en 2019."


Des membres de l'équipe offre et style détaillent les ambitions produit de Jules. - FNW


Pour gagner du temps et des allers-retours de prototypes avec les fournisseurs, les équipes produit sont formées à la conception 3D. Et les bassins de production évoluent aussi: "Notre objectif est de passer à 25% de sourcing proche en 2025 (Europe et pourtour méditerranéen), contre 10% actuellement", énonce la directrice de l’offre Erika Joffrin-Cadix. Le made in France se profile également avec la construction dans le Nord de l'usine de jeans FashionCube qui doit produire ses premières pièces en février prochain. "En vitesse de croisière, le site fournira chaque année 400.000 pièces, dont 100.000 pour Jules", poursuit-elle.

Côté style, la marque se départit de son taillant "slim" des dernières années (tee-shirts cintrés et jeans skinny), et propose de nouveaux fitting plus larges, allant de pair avec une recherche de confort accentuée par la crise sanitaire. "Ce porté plus loose est nouveau chez Jules, et conforte notre volonté d’habiller toutes les morphologies", commente Phil Barillet, coordinateur style, tout en détaillant les silhouettes du printemps-été 2022, déjà composées dans l'une des salles du siège. "Notre intention est aussi de remettre la couleur sur le devant de la scène, de proposer des graphismes identitaires, tout en restant sur le créneau d’une mode démocratique".


Pour l'automne-hiver, l'enseigne a shooté sa campagne à Roubaix, et noue un partenariat produit avec Pataugas - Jules


Malgré l’impact de la crise sanitaire, qui a fait perdre à l’enseigne 130 millions d’euros en 2020, puis 90 à 100 millions en 2021, celle-ci a repris le chemin des ouvertures de boutique cette année avec une quinzaine d’inaugurations programmées, dont un nouveau magasin installé cet été au sein de Nice Cap 3000.

"Jules était par le passé sorti des radars par un sous-investissement en communication, mais se rapproche aujourd'hui du numéro un Celio, qui est sur-représenté à Paris, et a été plus fort que nous sur la prise de parole. On lit pour Jules un vrai rebond de notoriété depuis le lancement de la campagne ‘Men in Progress’", indique Franck Poillon, qui entend rajeunir quelque peu la clientèle, dont le cœur de cible est fixé sur les 25-35 ans.

De nouveaux magasins vont s’installer en Ile-de-France, où la marque n’a donc pas toujours été en réussite. "Dans la capitale, nous fonctionnons bien en proximité, dans les quartiers, donc nous ouvrirons peut-être des surfaces plus petites, et surtout pas dans des rues scintillantes comme le font Zara et H&M". Une logique qui prévaut aussi en régions. "Jules a à cœur de se rapprocher de son cœur de cible, le Français provincial, et je ne le dis surtout pas avec un mauvais état d’esprit".


Le concept magasin revu en 2019 - Jules


L’autre chantier retail est celui de la centaine de magasins Brice, à la cible plus âgée et plus citadine, qui doivent progressivement passer sous enseigne Jules, tout en conservant un assortiment plus classique pour ne pas dérouter leurs clients habituels. Au sein du réseau Jules, une quarantaine d’unités ont basculé sous le nouveau concept magasin dévoilé à Bordeaux en 2019.

Le développement futur de l’enseigne pourrait aussi passer par des alliances retail avec les autres marques du groupe FashionCube. Jules a par exemple testé cet été l’installation d’un bi-store avec l’enseigne de mode féminine Grain de Malice.


Franck Poillon - Jules


"On observe une poursuite de la baisse de trafic en magasin, en revanche le client vient pour acheter. Le panier moyen a dépassé les 50 euros", livre le dirigeant, qui estime que le fait de faire grandir la part des ventes web (5 à 6% aujourd’hui) n’est pas une fin en soi. "C’est la logique omnibusiness qui nous intéresse, celle de répondre au besoin du client sur tous les canaux". L’un des relais de croissance identifiés par Jules est celui de référencer d’ici la fin de l’année son offre sur des marketplaces (où elle n’est quasiment pas présente), et ce en France comme à l’international. "La fréquentation des magasins est en souffrance, les clients sont bien quelque part !" expose-t-il.

Jules, dont le chiffre d’affaires global en "année normale" voisinerait les 500 millions d’euros, entend également se renforcer à l’export où elle réalise 10% de ses ventes. Sans forcément entrer sur de nouveaux marchés, mais plutôt en faisant "tache d’huile" là où elle est déjà présente, comme par exemple en Belgique, en Italie ou en Espagne, ou sur le continent africain où elle opère entre autres avec CFAO. Entre la France et l’international, ce sont 50 à 60 ouvertures qui sont envisagées à horizon 2023.

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