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14 mars 2022
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Catherine Gallais (RougeGorge): "Notre prochaine étape, c’est le développement à l’international"

Publié le
14 mars 2022

A la tête de RougeGorge depuis 2009, Catherine Gallais a contribué à la montée en puissance de l'enseigne du groupe FashionCube dans le paysage de la lingerie milieu de gamme en France. La crise sanitaire a-t-elle freiné sa croissance et remis en cause ses objectifs? La directrice générale livre son bilan et ses projets à FashionNetwork.com. Dotée d'un parc de 255 magasins, la chaîne de sous-vêtements née en 1992 dans le Nord veut s'internationaliser, faire grandir ses deux nouvelles marques propres lancées l'an dernier, et limiter encore son impact sur la planète.


Catherine Gallais - Thierry Thorel


FashionNetwork.com: Comment se porte l’enseigne, après avoir traversé deux années de crise sanitaire?

Catherine Gallais:
Sur le secteur des chaînes de lingerie en France, RougeGorge a stabilisé et même conforté sa deuxième place, derrière Etam qui est loin devant (données Kantar). Au-delà de ça, nous continuons de creuser notre sillon et de développer l’identité et la cohérence de la marque. En deux ans, elle a gagné huit points de notoriété, ce qui est énorme. La proximité est vraiment mise en avant dans notre discours, qu’elle soit relationnelle ou géographique, car nos boutiques sont surtout présentes dans des petites et moyennes villes.

FNW: C’est ce qui vous a permis de vous en sortir durant la pandémie Covid-19?

CG:
Oui, la proximité a été un élément résilient pendant la crise, et nous sommes reconnus pour cela. Notre NPS atteint plus de 74% (Il s’agit du pourcentage de clients qui évaluent leur probabilité de recommander une entreprise, ndlr). Nous recrutons aussi de nouvelles clientes, même si notre cœur de cible est fixé sur les 35-45 ans, et avons étendu notre offre, des tailles 85A au 115G, ce qui permet de s’adresser à beaucoup de femmes. RougeGorge déploie aussi des couleurs et des styles très variés, du sexy (à la Livy), au classique, jusqu’aux pièces ultra mode et au glamour (le positionnement d’Aubade). Avec une forte accessibilité prix.

FNW: Quel a été votre niveau de ventes sur la période?

CG:
Le marché de la lingerie dans son ensemble a été plus résilient que celui du prêt-à-porter pendant la crise, avec un repli de 14% en 2020, par rapport à 2019. RougeGorge a même mieux résisté avec une baisse de 11% seulement. Et, en 2021, l’entreprise a rattrapé son niveau d’avant-crise, avec un chiffre d’affaires situé autour de 120 millions d’euros. Elle est même restée rentable ces deux dernières années.

Ce qui différencie la lingerie par rapport à la mode, c’est qu’il s'agit d'un marché de besoin, de renouvellement, plus raisonné; les sous-vêtements sont également plutôt absents du marché en essor de la vente d’occasion. Ce qui perturbe davantage les enseignes de prêt-à-porter. La seconde main est tout de même un sujet que l'on regarde de près…


La marque Leel a été lancée en 2021 par l'enseigne - DR


FNW: Côté produit, avez-vous opéré de nouveaux lancements?

CG:
Nous avons fait naître deux nouvelles marques l’an dernier! Tout d’abord Leel, qui représente pour nous un nouveau segment cliente: c’est une griffe indépendante ciblant les jeunes filles aux poitrines généreuses, avec un style plus jeune et tendance. Elle est née d’un constat, celui que les morphologies des 15-25 ans ont évolué, elles sont beaucoup plus nombreuses que par le passé à porter de grands bonnets. Le sourcing est européen et le prix d’un soutien-gorge est d’environ 35 euros. La marque est pour l’heure 100% digitale, avec son propre site, mais ses produits sont aussi référencés sur l’e-shop de RougeGorge et dans quelques magasins du réseau. Nous avons maintenant envie de la développer en wholesale, en grand magasin et chez les détaillants, et ce en France et à l’international.

De plus, la marque Rose a été créée au sein de RougeGorge pour souligner l’arrivée d’une gamme de parures sexy et très travaillées, reprenant les codes de la séduction, avec un positionnement prix un peu plus élevé (autour de 50 à 65 euros le soutien-gorge). La gamme, vendue dans tout le réseau, a également vocation à vivre par elle-même dans le réseau des multimarques lingerie. Enfin, nous avons aussi lancé une ligne maternité l’an dernier.


Body émanant de la griffe sexy "Rose" - DR


FNW: Sur le plan physique, comment a évolué le parc de magasins de l’enseigne?

CG:
Le réseau atteint 255 points de vente, dont 246 en France, et neuf unités en Belgique. Je dirais qu’il est presque mature, et qu’il n’y aura que 5 à 10 ouvertures nettes durant les deux à trois ans à venir. Un parc, cela se travaille, et ce qui nous occupe est davantage de nous relocaliser dans les bons endroits.

Notre prochaine étape, c’est le développement à l’international: nous souhaitons pour cela signer des contrats en masterfranchise, pour développer des points de vente à l’étranger. Nous sommes aussi en discussion avec Asos, Zalando et Amazon pour commercialiser nos produits sur ces marketplaces. Avec nos trois marques.

FNW: Vous avez testé ces dernières années des points de vente partagés avec Dim et Grain de Malice (appartenant aussi à FashionCube), cette volonté de mutualisation se poursuit-elle?

CG:
Nous continuons d’opérer des magasins avec Grain de Malice (quatre unités, et deux à venir, à Urrugne et Cernay, ndlr) et Dim (deux adresses), l’enjeu est surtout de faire des ajustements constants pour trouver une cohérence. Un travail toujours en cours. Avec le recul, nous nous sommes par exemple rendus compte qu’il fallait deux équipes de vente distinctes pour RougeGorge et Grain de Malice, pour mieux épauler la cliente.


Le bi-store RougeGorge x Dim, à Nîmes - RougeGorge/LinkedIn


FNW: Le canal digital a-t-il pris de l’ampleur durant cette période de consommation chahutée?

CG:
Bien sûr, les ventes en ligne ont plus que doublé en deux ans, et on arrive aujourd’hui à un plateau. Cela veut dire que l’engouement pour ce mode de shopping ne redescend pas.

FNW: Le chantier de l’écoresponsabilité vous occupe également. Pouvez-vous faire part de vos avancées?

CG:
Nous avons structuré notre programme RSE, et y avons apporté du muscle, si je puis dire! Tous nos produits sont labellisés Oeko-Tex, et notre travail en cours est de passer de 4 à 20% de produits fabriqués en proche import d’ici 2025. Nous avons aussi éliminé la sacherie en plastique et utilisons des cintres réutilisables (en circuit fermé).

D’autre part, notre collection nuit se compose maintenant à 12% de fibres recyclées. Nous ambitionnons d’atteindre 50% d’ici trois ans pour cette catégorie, et d’avoir 30% de matières recyclées pour la collection jour. Il est à ce jour plus difficile de trouver des textiles recyclés de qualité pour la lingerie. Mais, si nous ne fournissons pas ces efforts, cela nous sortira du marché. Le chemin vers plus de durabilité est un peu plus long en lingerie qu’en prêt-à-porter, toutefois cela n’est pas impossible. Nous devons contribuer à faire baisser l’empreinte carbone de la filière.


Les cintres réutilisables introduits l'an dernier en magasin - RougeGorge


Sur le volet sociétal, nous accompagnons les femmes depuis longtemps, en interne, par exemple en favorisant le passage de responsables magasin au statut d’affiliés, et soutenons directement des associations comme Solfa ou Ruban Rose. Nous allons d’ailleurs proposer cette année des séances de coaching au siège, pour des femmes sur la voie d’une réinsertion dans le monde professionnel, mais aussi des mises en situation de travail en magasin (d’abord en Normandie).

FNW: Comment appréhendez-vous le début d’année réalisé par l’enseigne ?

CG:
On observe un petit ralentissement. On sent aujourd’hui une interrogation quant au contexte géopolitique et une préoccupation sur le pouvoir d’achat. En revanche, je pense que si les magasins restent ouverts toute l’année, l’enseigne devrait faire mieux que l’an dernier. Dans ces situations très mouvantes, le plus important est d’être prudent, agile et de porter un projet d’entreprise fort, qui mobilise les équipes.

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